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Les jeunes proches aidants «invisibles» : une étude de Aude Villatte

Selon Aude Villatte, professeure au Département de psychoéducation et de psychologie au campus de Saint-Jérôme, les jeunes personnes proches aidantes sont un phénomène émergent au Québec qui est reconnu comme un problème de santé publique en raison de sa prévalence élevée et de ses impacts sur nos jeunes. 

« Ce projet a permis de dresser un portrait de ces jeunes aidants au Québec et d’explorer les impacts de leur rôle d’aidant sur leur développement personnel, leur adaptation psychosociale et scolaire, ainsi que sur leur bien-être global, » explique la chercheuse, qui est aussi rattachée à l’unité de formation et de recherche de psychologie de l’Universite de Toulouse Jean Jaures (laboratoire PS-DT) et.  L’étude conclut sur l’importance d’accompagner davantage les jeunes adultes aidants pour soutenir leur expérience scolaire, leur santé mentale et leur future vie d’adulte, d’où le défi de repérer ces jeunes aidants afin de leur offrir un soutien adapté à leurs besoins. » 

Notons que l’étude dirigée par la professeure Villatte a été mandatée par le ministère de l’Enseignement supérieur, en collaboration avec le ministère de l’Éducation et le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec.


L'étude a attiré l'attention de nombreux médias.

Radio-Canada Ottawa-Gatineau: https://ici.radio-canada.ca/ohdio/premiere/emissions/sur-le-vif/episodes/930407/rattrapage-lundi-27-janvier-2025

Le Droit: https://www.ledroit.com/chroniques/patrick-duquette/2025/01/28/a-la-maison-cetait-moi-la-maman-GB24DD5RPNFYDPSIJ3I4VIKGUI/

La Presse: https://www.lapresse.ca/actualites/2025-01-23/environ-21-des-etudiants-sont-proches-aidants-au-quebec.php

Le Devoir: https://www.ledevoir.com/societe/835555/environ-21-etudiants-sont-proches-aidants-quebec


L’impact du rôle d’aidant sur la scolarité

La recherche, intitulée Étude sur les élèves et les étudiant.es soutenant un.e proche au Québec (ESPQ), a été réalisée par le Laboratoire de recherche et d’actions pour les personnes ayant des problèmes de santé mentale et leurs proches (LaPProche). L’étude visait à brosser le portrait de l’expérience scolaire des jeunes adultes aidants en les comparant à leurs pairs ayant un proche malade mais non-aidants et leurs pairs sans proche malade. « Nous avons voulu évaluer au moyen d’un questionnaire, les implications sur l’expérience scolaire d’être confrontés aux difficultés d’un proche en assumant le rôle d’aidant, » précise Aude Villatte. Les indicateurs objectifs utilisés étaient par exemple, le nombre de redoublements et d’interruption d’études, alors que les indicateurs subjectifs étaient basés sur une auto-évaluation des répondants de leur adaptation académique, sociale et émotionnelle.
 

Pour consulter l'étude
 

La professeure Aude Villatte, du Département de psychoéducation et de psychologie au campus de Saint-Jérôme


La famille d’abord

Les jeunes personnes qui assument un rôle d’aidant soutiennent habituellement un parent atteint d’un trouble mental, d’une maladie physique, d’une invalidité ou de troubles liés au vieillissement. « Ces jeunes aident souvent leur mère par exemple, » note Aude Villatte, « mais peuvent aussi prendre soin d’un grand-parent, d’un frère, d’une soeur ou même d’un membre éloigné de la famille. » Les données de l’enquête ont également démontré qu’environ un tiers des jeunes personnes proches aidantes prennent soin d’au moins deux personnes de leur entourage, qu’un jeune sur trois consacre de 11 à 20 heures par semaine à soutenir un ou plusieurs proches avec certains atteignant même cinquante heures!

Les défis des jeunes adultes aidants

Si le rôle de proche aidant peut permettre de se sentir utile et d’apprendre sur soi, il expose les jeunes adultes aidants à des défis pouvant affecter leur santé et leur adaptation psychosociale et scolaire.

Plusieurs répondants ont exprimé leurs difficultés à trouver un équilibre et à répondre à leurs propres besoins estimant que leur responsabilité pouvait limiter le temps et l’énergie disponibles pour leurs études, leurs amis, des loisirs et de saines habitudes de vie. Intégrer leur rôle de proche aidant dans leur identité en plein développement pose aussi problème quand vient le temps d’explorer d’autres intérêts et talents ou de se projeter dans l’avenir ou de se sentir à sa place parmi les autres jeunes. Enfin, un autre grand défi réside dans le manque de soutien dans leur milieu. 

« Plusieurs jeunes ne se sentent pas reconnus par leur entourage y compris les parents qui sous-estiment leur contribution, note Aude Villatte. Certains cachent même leur situation à l’école d’où cette invisibilité qui les affecte tant. »

 

Documenter la jeune proche aidance pour sensibiliser et outiller le milieu scolaire

« L’objectif de nos recherches est de documenter le phénomène des jeunes aidants au Québec en trois volets incluant le primaire (7 à 12 ans), le secondaire (12 à 18 ans) et le postsecondaire (18 ans et +) afin de sensibiliser les établissements scolaires et de les outiller face à cette réalité, » explique Aude Villatte.

« Il est crucial que le milieu scolaire reconnaisse que nos jeunes aidants, quel que soit leur âge, ont besoin de soutien et doivent être entendus, compris et aidés. Savoir les repérer et leur offrir ce soutien, voilà notre défi. » 

Lors de la diffusion officielle des résultats, l’équipe de recherche dévoilera certains outils développés dans le cadre du projet dont une formation sur la jeune proche aidance destinée aux milieux postsecondaires et un questionnaire en ligne visant à aider l'identification des enfants à risque de jouer un rôle d'aidant.